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Entrepreneurs sur la route

YVON LAPRADE

Ils ont quitté l’Allemagne avec leurs deux jeunes enfants pour réaliser un rêve : traverser le Canada coast to coast tout en continuant de travailler à distance. Mais avant de monter dans l’avion qui devait les conduire à Montréal, ils ont pris les arrangements nécessaires afin que leur véhicule, le VR à bord duquel ils allaient passer une année entière sur les routes du pays, arrive à bon port — au port de Halifax — au terme d’une longue traversée.

Franzi Schatz et son conjoint, Marius Müller, sont des télétravailleurs… mobiles. Ils mangent et dorment dans leur van, roulent leur vie en famille et gardent un lien étroit avec leurs clients à bord de cet habitacle transformé en place d’affaires.

Ce sont, en fait, des entrepreneurs de la nouvelle génération. Leur patron, c’est eux. Si la business va bien, ils sont heureux. Si ça va moins bien, ils font avec. Par-dessus tout, ils priorisent la vie de famille.

Il y a près de deux mois, ils n’ont pas hésité à prendre le large avec Leo et Casper, de même qu’avec Lotta, leur chien labrador. Leur Sprinter qui affiche au-delà de

100 000 kilomètres au compteur ne passe pas inaperçu.

Il faut dire que leur véhicule en impose avec ses quatre gros phares au-dessus du pare-brise, ses deux vélos accrochés à l’arrière, ses réservoirs «de survie» fixés au-dessus du pare-chocs, et ce lettrage stylisé sur une des fenêtres où on peut lire en toutes lettres : Road Typing, la marque de commerce de leur entreprise.

Franzi et Marius gagnent leur vie et donnent libre cours à leur esprit créatif dans le domaine du design, et ils le font très bien, ayant remporté en 2018 le German Design Award.

Ces deux globe-trotters voient la vie autrement et prennent la route différemment. Ce voyage en terre d’Amérique, c’est pour eux une façon d’aller voir si le gazon est plus vert de l’autre côté de l’Atlantique.

À 33 ans, ils ressentaient le besoin de partir loin, de s’éloigner de leur campagne, quelque part en Bavière, pour retrouver leurs repères.

DANS LE PARKING

C’est tout à fait par hasard que j’ai fait leur rencontre, pas plus tard que mardi de cette semaine. Ils venaient alors de passer la nuit dans le parking de la magnifique église patrimoniale Saint-Joseph, à Deschambault-Grondines, dans la région de la Capitale-Nationale.

À ce moment-là, Franzi s’affairait à l’intérieur du véhicule, où tous les espaces sont rentabilisés au pied carré, avec lit amovible, support pour ordinateur portable, frigo, cuisinette, salle de bains, tandis que Marius jouait avec les enfants.

Leur chien faisait la sieste. Tout à côté, le fleuve Saint-Laurent suivait son cours. Une journée qui annonçait la venue de l’été et les festivités du 24 juin.

«C’est beau chez vous, les gens sont accueillants», m’a-t-elle dit, d’entrée de jeu.

Puis, avec son sourire franc, elle m’a confié que son français appris à l’école, dans son village situé à bonne distance de Munich, capitale de l’Oktoberfest, là où la bière coule à flots, n’était pas toujours facile à comprendre par les gens de chez nous.

La conversation venait de s’engager sur une bonne note... et avec un accent prononcé. C’était le moment propice pour lui demander pourquoi la petite famille tenait tant à venir travailler — et visiter — le Canada.

«Vous savez, l’Allemagne et votre pays ont beaucoup d’affinités, m’a-t-elle répondu. On a un peu les mêmes mentalités, les mêmes façons de voir les choses.»

Et le prix du diesel à 2,45 dollars pour remplir le réservoir du Mercedes fabriqué en Allemagne?

«On est habitués à payer ce prix à la pompe. C’est notre réalité depuis un bon moment, on a fini par s’y faire.»

Et le prix des aliments?

«Là alors, il y a une grande différence, a calculé Franzi. J’ai été surprise de constater que ça coûte le tiers de plus pour se nourrir. Et on essaie le plus possible de manger bio.»

UN AN, DEUX PEUT-ÊTRE

Depuis le début du périple, Franzi, Marius, Leo et Casper n’ont pas assez de leurs quatre paires d’yeux pour s’en mettre plein la vue. C’est un voyage qu’ils documentent à coups de photos saisissantes et spectaculaires.

Au cours des derniers jours, ils sont passés par le Nouveau-Brunswick, puis Québec et Trois-Rivières, en empruntant la route 138, en se perdant volontairement sur le chemin du Roy.

Ils prévoyaient s’arrêter à Montréal au cours du week-end sur le chemin menant au Vieux-Port. Et après, vous allez où?

«On ne sait pas encore, on prend notre temps, on se laisse surprendre.»

Faut dire qu’avec des enfants âgés de 2 et 4 ans, et des clients internationaux qui ont des besoins toujours plus urgents les uns que les autres, il faut se donner une certaine marge de manoeuvre.

«On a établi notre routine. Le matin, on se lève très tôt pour le travail. Il faut tenir compte du décalage horaire, [considérant] qu’en Europe c’est de cinq à six heures plus tard qu’ici. On prend congé au début de l’après-midi. On redevient parents à temps plein.»

C’est la vie qu’ils ont choisie, qu’ils ont planifiée au quart de tour, bien qu’en voyage, et encore davantage quand on vit dans un habitacle de petite dimension, on ne peut pas toujours prévoir l’imprévisible.

«On va vivre notre année de la façon la plus intense possible, on va parcourir le Canada jusqu’à Vancouver, mais on ne sait pas ce qu’on va faire après. Qui sait si on ne fera pas une autre année, cette fois pour parcourir les États-Unis, la Californie, la Floride…»

AFFAIRES

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2022-06-25T07:00:00.0000000Z

2022-06-25T07:00:00.0000000Z

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