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LES STATISTIQUES AVANCÉES À LA RESCOUSSE!

SYLVAIN ST-LAURENT sstlaurent@ledroit.com

On pourrait difficilement concevoir un début de carrière plus brutal. À 47 ans, l’automne dernier, André Tourigny faisait ses débuts en tant qu’entraîneur-chef, dans la Ligue nationale de hockey. Ses joueurs l’ont fait attendre un grand bout avant de lui offrir sa première victoire.

Après 11 matchs, les Coyotes de l’Arizona avaient obtenu un seul point au classement.

Même s’il était parfaitement conscient du défi qu’il devait relever dans le désert, le Québécois commençait forcément à ressentir la pression.

Avec toute l’expérience acquise à d’autres niveaux, il avait quelques tours dans son sac.

Un jour, il s’est tourné vers les statistiques avancées afin de montrer à ses joueurs que tout n’était pas sombre.

«Durant cette séquence, nous étions, malgré tout, une des meilleures équipes de toute la ligue en ce qui a trait au pourcentage de lancers voilés. Nous étions aussi au troisième rang pour le nombre de lancers de qualité alloués depuis l’enclave.»

«Ce sont des petites choses qui ont permis de remettre les pendules à l’heure», fait-il valoir.

Tourigny est de retour chez lui, à Ottawa.

Les Coyotes ont conclu leur saison il y a presque deux mois. Il a pris le temps d’évaluer ce qui a bien fonctionné — et moins bien fonctionné — dans une campagne où l’équipe a conservé une fiche de 25-50-7.

«Si on s’attarde uniquement aux matchs disputés entre le début du mois de décembre et la fin du mois de mars, on présente une fiche de ,500. Ça nous donne quatre bons mois en ligne. C’était le fun.»

Le 31e rang du classement général n’a rien de bien impressionnant.

«Je ne suis pas un gars de statistiques. Je ne me fixe jamais d’objectifs chiffrés pour les victoires ou pour les points. Je n’en ai jamais eu, même dans le junior! J’essaie de soutirer le meilleur de nos joueurs. Honnêtement, en début de saison, je n’aurais pas cru qu’on finirait par obtenir autant de points.»

Tourigny n’est pas un «gars de statistiques». Toutefois, comme on vient de constater, il est à l’aise avec les statistiques avancées.

«Je suis curieux», insiste-t-il.

Il est conscient que tous ses collègues n’ont pas cette ouverture d’esprit.

«Il y a toujours un écart entre les statistiques avancées et ce qu’on peut voir à l’oeil nu, a-t-il remarqué. L’écart est bien évident à certains niveaux. Le plus gros problème, c’est que les gens des deux côtés sont entêtés. Au lieu de s’asseoir ensemble...»

Il prend alors une pause. Il lève ses deux mains devant son visage. Il ferme ses poings. Il cogne ses jointures, ensemble, à deux reprises.

«Et là, chacun repart de son côté.»

«Dans toutes les organisations, ça se passe comme ça, enchaînet-il. Tous les entraîneurs ont l’impression que leurs préposés aux stats avancées sont des innocents. Les gars de stats avancées, de leur côté, sont convaincus que les entraîneurs ne comprennent rien. Il y a un véritable choc culturel.

Les gars de stats avancées, dans bien des cas, sont des nerds. Les hommes de hockey sont de la vieille école. Les deux peuvent apprendre au contact de l’autre.»

En Arizona, André Tourigny s’est donc efforcé d’établir de bons liens avec son statisticien principal. «Je lui ai dit que je voulais qu’on travaille ensemble.»

Les premières conversations n’ont pas toujours été faciles.

«À certains moments, quand il m’offrait ses évaluations de certains joueurs, je lui disais qu’il était dans le champ. Il me répondait alors que c’est moi qui était dans le champ. Je lui disais que c’était impossible. Je lui disais qu’à force de s’entêter, comme ça, il risquait de perdre le respect des gens de hockey. Quand ces gens ne te respectent plus, ils ne t’écoutent plus.»

Tourigny s’efforce de garder l’esprit ouvert. Les statistiques avancées, croit-il, sont là pour rester. Les chiffres existent. On ne peut pas les nier. Ensemble, avec l’aide des statisticiens, les hommes de hockey doivent apprendre à les interpréter.

«Quand un gars de chiffres parle à un gars de hockey, il doit apprendre à parler langage. J’ai expliqué à notre gars de chiffres qu’il travaille dans mon sport. Ce n’est pas moi qui travaille dans son domaine.»

EXPÉRIENCE

Tourigny parle de cette expérience avec enthousiasme. Le travail de reconstruction débute tout juste avec les Coyotes. Au moment d’écrire ces lignes, l’organisation détient sept choix dans les deux premières rondes pour la séance de sélection qui aura lieu dans une dizaine de jours, à Montréal.

Quand les joueurs prometteurs auront été sélectionnés, il faudra travailler fort au développement.

«Il me manque d’expérience. Je compense avec ma fougue, avec mon énergie», affirme l’entraîneur.

«Pour coacher une équipe comme les Sénateurs ou comme les Coyotes, il te faut de l’énergie.

Je ne suis pas convaincu qu’un entraîneur qui cumule 15 ou 20 années d’expérience comme entraîneur-chef dans la LNH est allumé par ce type de défi.»

«Quand je suis arrivé dans le junior, à Rouyn-Noranda, le défi de diriger les Huskies m’excitait. Aujourd’hui, si je devais retourner dans le junior, je préférerais me greffer à une organisation comme celle des 67’s d’Ottawa, qui me donne de meilleurs moyens.»

Tourigny n’est pas pressé. Même s’il faut faire un détour par le campus de l’Université Arizona State, l’hiver prochain, il est bien disposé à faire une différence au sein de cette organisation qui en a grand besoin.

MAG SPORTS

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2022-06-25T07:00:00.0000000Z

2022-06-25T07:00:00.0000000Z

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