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Débarqués VOYAGE AU FIN FOND DE L’ABITIBI

DANIEL CÔTÉ dcote@lequotidien.com

Deux hommes à l’allure suspecte se présentent à des rendez-vous dans la grande ville. À chaque occasion, une personne adulte leur confie un jeune atteint d’un handicap. Elles donnent l’impression de s’en débarrasser et justement, c’est le sens de leur démarche...

L’entente conclue avec une organisation évoluant en marge de la société prévoit qu’en retour d’une somme d’argent, elle prendra charge de ces infortunés «colis», ceux qui forment le coeur de la bande dessinée Débarqués.

Cette histoire destinée aux lecteurs matures a été scénarisée par André Marois et illustrée par Michel Hellman. Ils décrivent un road movie d’un genre inédit, alors que les deux transporteurs, Gil et Jean-Fran, doivent filer jusqu’au fin fond de l’Abitibi sans attirer l’attention des policiers.

Comme ils doivent également s’occuper des jeunes, dont la liste des besoins les dépasse rapidement, ça ajoute à ce huis clos une touche d’imprévu teintée d’humour noir.

«Il s’agit de ma première BD et c’est l’éditeur Frédéric Gauthier qui m’a matché avec Michel, dont je connaissais les albums. Pour écrire la trame, je me suis basé sur le rêve qu’a fait une amie. Il y avait une barque avec une personne handicapée, ainsi que d’autres «personnes handicapées dont on s’occupait.

Comme j’aime gratter les bobos de la société par le biais du roman noir, j’ai été là-dedans», relate André Marois au cours d’une entrevue téléphonique accordée au Quotidien.

Au début, l’accent est mis sur la dynamique entre Gil, un homme âgé un brin cynique, mais pas complètement amoral, et son complice avec lequel il vient de faire connaissance.

«Jean-Fran étant un type louche, ça a été facile de lui prêter ces traits, tandis que l’autre correspond essentiellement à son âge. Dans son cas, il y avait plein de codes visuels auxquels je pouvais me référer», fait observer Michel Hellman.

COCO

Plus le voyage progresse, cependant, et plus s’affirme un autre personnage. Il s’agit de Coco, un garçon trisomique dont la personnalité enjouée ajoute un soupçon de lumière à la BD.

Au début, on le sent tendu, peu enclin à déroger de sa routine, mais quand les transporteurs lui présentent cette sortie comme un voyage, il se transforme en parfait compagnon de route, devenant même copain avec l’énigmatique Winston, dont l’autonomie est pratiquement inexistante.

«Coco, je l’ai rendu plus lucide qu’on pensait, très humain. À un moment donné, il se lie d’amitié avec son voisin. Il est dans la positivité à l’occasion d’un voyage malaisant.

«J’ai d’ailleurs choisi l’Abitibi comme destination parce que je voulais les faire rouler longtemps. On mange. On roule. On écoute de la musique. On roule. Ça laisse du temps pour tisser des liens et parfois faire des blagues pour détendre l’atmosphère», énonce André Marois.

DÉFI

La monotonie du trajet a posé un défi à Michel Hellman, puisqu’une grande part de l’action se déroule à l’intérieur du véhicule. «Il fallait rendre ce road trip vivant en évitant les répétitions. «Dehors, par contre, on reconnaît les Laurentides, avant que le groupe ne s’enfonce dans une forêt de plus en plus sombre. Comme j’adore aller dans le parc de La Vérendrye, ce sont des paysages que j’aime dessiner», mentionne-t-il.

Aussi, la nature de l’histoire imaginée par son partenaire l’a interpellé dès sa première lecture du scénario. «C’est un texte que je trouvais courageux, qu’il était important de faire connaître. Moi qui fais des BD humoristiques, ça m’a sorti de ma zone de confort, mais il me semblait nécessaire d’aborder le rapport de notre société avec les enfants handicapés, indique le dessinateur.

«J’ai été touché, entre autres, par les points de vue différents de la mère de Winston, qui se demande ce qu’il adviendra de lui après son décès, et du frère de Coco, qui vient d’hériter et souhaite se débarrasser d’un bagage encombrant.»

C’est lui qui a adapté le texte au format de la BD, procédant à un découpage si efficace que l’auteur a pu élaguer des phrases devenues redondantes. «J’ai aimé travailler avec Michel. Ça fonctionnait bien et je suis très heureux du résultat», raconte André Marois.

«Moi aussi, je suis content, complète Michel Hellman. Le travail a été plus long que je l’avais imaginé, mais pour un créateur, il est important de sortir d’une certaine facilité.»

LE MAG

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2022-06-25T07:00:00.0000000Z

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