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40e SYMPOSIUM INTERNATIONAL D’ART CONTEMPORAIN DE BAIE-SAINT-PAUL

JOSIANNE DESLOGES Collaboration spéciale

On peut trouver des similitudes entre les systèmes racinaires et les réseaux informatiques, entre le monde naturel et le monde numérique. Pour le 40e Symposium international d’art contemporain de Baie-Saint-Paul, les connexions et interconnexions sont abordées par onze artistes et un duo, qui créent et discutent avec les visiteurs pendant tout le mois d’août.

Parmi les artistes retenus cette année, Marilyne Busque-Dubois, de Baie-Saint-Paul, a mis le cap sur le Domaine Forget le temps du Symposium. Sa plume s’alimente à des témoignages sensibles en lien avec la nature, qu’elle rassemblera dans une sculpture textile éphémère.

Sinon, tous travaillent dans l’ancienne école et nouveau pavillon du Musée d’art contemporain et profitent du bouillonnement et des charmes bucoliques de Baie-Saint-Paul.

Avec les nombreuses personnes qui déambulaient d’une classe à l’autre dimanche après-midi, plusieurs artistes s’étaient résignés (à des degrés divers de lâcher-prise) à laisser leur projet en jachère jusqu’au lendemain matin. La création en matinée et la médiation en après-midi constituent un double mandat qui use ou nourrit — selon les jours et les tempéraments.

Pour les visiteurs, toutefois, c’est une occasion unique de découvrir une variété de pratiques artistiques entre lesquelles la thématique tisse des liens.

La directrice artistique Anne Beauchemin entame son mandat de trois ans en sondant le vaste territoire du numérique, qui influence nos liens sociaux, nos façons de penser et qui fournit de nouveaux outils de création aux artistes.

Luc Courchesne, pionnier des arts numériques au Québec, est le président d’honneur de l’événement. On peut le rencontrer dans la grande salle, où diverses activités de médiation permettent au public de se familiariser avec l’art virtuel.

S’infiltrant dans le corridor et l’escalier qui mène aux ateliers, les oeuvres sonores de Sylvie Laplante sont des tentatives de retrouver le fond de rayonnement sonore de l’impact de la fameuse météorite qui a façonné le panorama de Charlevoix.

MICROCOSMES RÉELS ET VIRTUELS

Sur les étages, chaque classe est transformée en atelier. Celui de Sylvain Lafleur est plongé dans la pénombre enveloppante et vivante d’une projection vidéo. Ses sculptures, faites de coquillages ou de bois de grève, évoquent des volumes générés par la modélisation 3D. Ses dessins s’animent ou sont magnifiés par la lumière du projecteur. Nous n’aurons pas de meilleur exemple de microcosme nourri par de riches échanges entre le réel et le virtuel que celui-là.

La toile faite de bas-culotte et de ballons gonflables d’Irene Anton souffre de la comparaison. Troquant les couleurs vives de ses installations extérieures pour des teintes plus ternes qui siéent mieux à sa petite pièce beige, l’Allemande tisse un réseau qui veut évoquer le cerveau mondial.

S’inspirant des structures de protection (tours de guet, château fort,

bunkers), Vasilis Vasili place des bouts de sculptures minimalistes sous l’oeil aveugle d’une petite caméra de surveillance en bois. Une entreprise zen, qui catalyse d’une certaine manière la peur et les questionnements qui nous taraudent.

S’INSPIRER DES ARBRES

Le duo de Sherbrooke SYLLAD profite du Symposium pour poursuivre un projet déjà bien — voire trop — défini. Des branches tendues de fils colorés deviennent sculptures entre les mains de Sylvie Rochette. Des fils de fibre optique les transforment en réseaux lumineux. Des volontaires sont invités à identifier un arbre important pour eux et à poser devant la caméra de Ladislas Kadyszewski.

Patricia Lortie, établie à Calgary, retrouve avec bonheur la forêt québécoise. Après avoir lové des corps dans l’eau grâce aux outils numériques, elle travaille le carton récupéré pour en (re)faire des troncs d’arbre, où elle logera un petit projecteur, qui porte l’année d’une canopée en concentré.

Michel Boulanger utilise quant à lui du bois flotté de L’Islet pour dessiner dans l’espace des formes générées par ordinateur. Le croquis d’un intrigant manège, que l’imagination des visiteurs aura soin de compléter, prend forme.

L’ENVERS DE L’ÉCRAN

Maniant ruban adhésif et pinceaux, Oli Sorenson crée un nuage de tableaux qui reprennent les couleurs brillantes et la simplicité graphique des icônes d’applications mobiles. Les oeuvres se déclinent en version NFT sur l’écran, bonifiée d’effets d’animation.

L’atelier de Carolyne Scenna a des airs de studio de cinéma où tout est mis en scène. Manipulant de grandes mains blanches, écrasant des pêches, l’artiste crée réellement dans ce décor où le visiteur peut se laisser prendre à suivre un intéressant jeu de piste.

Serge Clément se livre à une enquête documentaire en isolant des photogrammes de films qui contiennent des erreurs ou des irrégularités formelles. Ses carnets, ses livres, sa documentation et des images projetées habillent son atelier, qui devient presque une scène lorsqu’il expose son entreprise aux visiteurs.

Chantal Lagacé possède le même don de parole accrocheur. Elle réalise une maquette de la ville où apparaissent les évolutions technologiques (téléphone, électricité, chemin de fer) qui ont marqué son développement.

Peintre investi, Hédy Gobaa travaille à plusieurs grands tableaux qui amalgament des éléments de paysages du Québec et de sa Tunisie natale. Les conteneurs qui filent sur le Saint-Laurent se trouvent soudainement au milieu des palmiers, symboles d’une marchandisation et d’une globalisation qui brouillent les frontières et a un fort impact écologique.

LE MAG

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2022-08-13T07:00:00.0000000Z

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