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DANS L’UNIVERS DE SCOTT-PIEN PICARD

MARIKA VACHON mvachon@latribune.qc.ca

C’est un deuxième album «beaucoup plus personnel que le premier» que Scott-Pien Picard a livré cette année. Pekuaiapu est une oeuvre dont le coeur est constitué d’espoir et de nécessité de «voir de l’avant».

On peut dire de Pekuaiapu, un opus comportant onze compositions originales, qu’il passe de fond en comble la vie de Scott-Pien. «On y retrouve des textes qui parlent de moi, de ma famille, de mes amis», résume le Nord-côtier âgé de 25 ans, qui écrit et chante dans sa langue maternelle, l’innu-aimun.

Par exemple, E pamishkaiati (Quand nous voyageons) aborde les impacts que la pandémie a eus sur la vie de tournée. «On n’a pas fait de tournée pendant deux ans. C’est une chanson qui évoque le "on s’ennuie de vous et on a hâte de vous voir"», fait partager Scott-Pien.

Il tenait également à inclure sur cet album une chanson spécialement dédiée à sa grand-mère décédée, Neka (Maman).

Comme plusieurs, l’auteur-compositeur-interprète a trouvé une source de temps et d’inspiration dans la pandémie : «C’est à ce moment que je me suis dit : “Je vais faire un deuxième album.”»

Mais que signifie Pekuaiapu, le titre du disque?

«C’est un mot qui n’existe plus, qui été oublié. Il n’est même plus dans le dictionnaire innu», mentionne Scott-Pien.

L’idée vient de Freddy Cluney du groupe Ninan, un ami avec qui il collabore pour l’écriture de ses chansons. Afin de valider l’existence antérieure de ce mot, Freddy et lui ont consulté plusieurs aînés.

«Il signifie visionnaire, il désigne quelqu’un qui va de l’avant et qui veut voir de l’avant. À l’époque, les chasseurs de caribou se faisaient dire ça, parce qu’ils pouvaient prédire par où allait arriver le caribou lorsqu’ils chassaient», raconte Scott-Pien.

CHANSON DE GUÉRISON

Pour la réalisation de Pekuaiapu, Scott-Pien a travaillé en collaboration avec le bien connu Éloi Painchaud, qui fait notamment partie du groupe Salebarbes. Scott-Pien a d’ailleurs écrit les chansons de son deuxième album en partie dans le studio d’enregistrement.

«Je n’aurais pas dû faire ça, j’aurais dû être prêt. J’ai écrit mes chansons en les traitant en studio», avoue l’artiste.

Scott-Pien compose la mélodie avant d’écrire les paroles de ses pièces. Le processus d’écriture se fait en plusieurs temps, car l’inspiration ne vient pas d’un seul coup.

«C’est compliqué parfois, car t’essaies de ne pas redire les mêmes affaires. Il faut que tu prennes le temps de t’asseoir et que tu l’écrives», souligne-t-il.

Certaines d’entre elles sont écrites en collaboration avec Freddy Cluney, qui vient l’aider «à mettre des mots» qui ne viennent pas dans un premier temps.

La dernière chanson de l’album, Shash, parle des enfants autochtones retrouvés sans sépulture sur les terrains des pensionnats. Cette pièce veut signifier que les gens qui ont été touchés par cette horrible découverte doivent «rester forts malgré ça et aller vers la guérison», mentionne Scott-Pien.

Le texte s’adresse également aux personnes qui ont vécu le pensionnat. «On s’est dit qu’on allait en faire une sur le sujet, mais pas seulement parler de ça. On l’a prise sous l’angle “ça allait vraiment mal, mais là, on veut aller mieux”. C’est comme une chanson de guérison.»

Shash a été composée en collaboration avec Samian et le groupe Maten.

AVEC ÉMILE BILODEAU

Récemment, Scott-Pien a collaboré avec Émile Bilodeau et Maten sur la chanson Tshe minupunanu. Scott-Pien et Émile se connaissaient déjà. Ils se sont rencontrés sur le plateau de Belle et Bum.

«Émile n’est pas difficile d’approche. Tu le rencontres la première fois et t’as l’impression que vous êtes amis depuis 20 ans. On se textait une fois de temps en temps, et, à un moment donné, on l’a invité au festival Kwé à Québec, où nous avons joué ensemble.»

Émile Bilodeau est ensuite venu passer des vacances sur la CôteNord. «Il m’a dit : “bon, j’m’en viens à Sept-Îles, pis on va écrire une chanson”», raconte Scott-Pien. Il avait déjà commencé écrire les paroles et le groupe Maten en a écrit une partie.

«Je n’étais pas là lors de l’écriture, mais il n’avait pas de mélodie. C’est moi qui l’ai faite», raconte-t-il. La chanson est interprétée par Émile, Scott-Pien et Maten.

UN AMOUR POUR LA MUSIQUE

C’est à l’âge de 6 ans que l’amour de la musique a foudroyé ScottPien Picard, lors du premier spectacle auquel il a assisté avec ses parents, celui de Maten, un groupe de musique innu.

«À ce moment-là, j’ai pogné un clic. Je regardais les chanteurs et je n’écoutais plus personne d’autre autour de moi. J’étais vraiment impressionné. Après, je voulais une guitare et je voulais toujours écouter de la musique. J’écoutais la radio, je me mettais devant et je faisais les backvocals des chanteurs innus», relate celui qui a écrit sa première chanson vers l’âge de 15 ans.

Il précise qu’il a appris la guitare par lui-même. «J’ai eu un an de cours de guitare, que j’ai un peu loafés [rires]. Mon père était fâché», dit-il en riant.

Pour le moment, il se concentre sur la tournée de Pekuaiapu, qui se poursuit jusqu’à la fin de l’année. Déjà, l’idée de réaliser un troisième album lui trotte dans la tête. «Je viens d’en finir un et, oui, je pense déjà à en faire un autre», reconnaît-il en riant.

«Il signifie visionnaire, il désigne quelqu’un qui va de l’avant et qui veut voir de l’avant »

— Scott-Pien Picard en parlant de Pekuaiapu, un mot oublié de sa langue maternelle

LE MAG

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2022-08-13T07:00:00.0000000Z

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