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BAISSE DES HOSPITALISATIONS «À CAUSE DE» LA COVID

JEAN-FRANÇOIS CLICHE jfcliche@lesoleil.com

Le nombre d’hospitalisations «liées» à la COVID-19 demeure élevé au Québec, avec autour de 500 à 600 nouvelles admissions par semaine en septembre, mais il y a proportionnellement moins de patients qui sont là «à cause de» la COVID qu’avant. De 50-52 % qu’ils étaient en début d’année, ils sont environ 38 % ce mois-ci, selon des chiffres obtenus par Le Soleil.

Les hospitalisations «liées à la COVID» viennent essentiellement en deux sortes : il y a les patients que le coronavirus a rendus si malades qu’ils ont besoin de soins en hôpital (les «à cause de» ou «pour»); et il y a les patients qui sont admis pour une autre raison, mais qui font un test sur place et qui s’avèrent positifs (les «avec la COVID»). Il y a aussi ceux qui tombent entre deux chaises ou dont la cause d’admission est inconnue —, mais ils ne forment qu’une petite partie des cas de COVID dans nos hôpitaux, autour de 5-7 %. Comme le montre le graphique ci-dessous, en début d’année, quand le ministère de la Santé (MSSS) a commencé à distinguer les «avec» et les «à cause de», les hospitalisations causées directement par le virus représentaient environ la moitié des hospitalisations liées à la COVID. La proportion a ensuite chuté jusqu’à 30 % en juin, avant de se stabiliser à 40-45 % par la suite et de repasser légèrement sous la barre des 40 % (à 38 %) en septembre.

Au MSSS, on explique cette baisse par le fait que «la circulation du virus est encore importante donc il y a beaucoup de cas “avec”, mais les cas “pour” sont proportionnellement moins nombreux, car le virus est moins virulent et l’immunité [collective] plus importante».

Certains travaux ont conclu que le variant Omicron, qui est devenu dominant au Québec au début de l’année, est plus transmissible, mais moins virulent que son prédécesseur, le variant Delta. Une étude de la Santé publique parue en mai [http://bitly.ws/uN94] indiquait qu’Omicron venait avec un risque de «formes sévères» (hospitalisation, soins intensifs et décès) environ 60 % plus faible, ce qui serait cohérent avec l’idée d’un virus qui pousse moins de gens à l’hôpital, mais que l’on détecte plus souvent chez les patients admis pour d’autres raisons. La thèse

de la virulence moindre d’omicron a cependant été critiquée dans d’autres travaux qui font valoir qu’il est difficile de séparer l’effet de la vaccination de masse de la sévérité d’une nouvelle souche du virus.

PLUSIEURS FACTEURS

Quoi qu’il en soit, «il y a plusieurs articles qui montrent qu’avec des infections répétées, le risque d’hospitalisation et de décès diminue par rapport au risque initial, confirme Dr Alex Carignan, clinicien-chercheur en infectiologie à l’Université de Sherbrooke. C’est la même chose pour ceux dont la vaccination est à jour, et la protection persiste plus longtemps contre les complications que contre les infections symptomatiques.» Il est donc logique qu’une immunité accrue augmente la part des hospitalisations «avec» diminue celle des «à cause de».

Plusieurs autres facteurs peuvent aussi entrer en ligne de compte. Dr Carignan et son collègue de l’INSPQ Dr Gaston De Serres soulignent tous les deux que le virus ne propage pas toujours uniformément dans toutes les tranches d’âge — lesquelles ne sont pas toutes également vulnérables aux complications, comme on le sait. Cependant, il ne semble pas que ce soit la cause de la diminution du pourcentage des «à cause de la COVID» dans les hospitalisations. En janvier dernier, les moins de 50 ans comptaient pour 18 % des hospitalisations COVID [http:// bitly.ws/uP74]; en juin, les moins de 50 ans n’atteignaient même pas 15 % des hospitalisations liées à la COVID, ce qui aurait en principe dû accroître la part des admissions «à cause de», mais c’est justement le moment où elle a atteint son creux de 30 %.

De toute manière, dit Dr De Serres, il reste que la baisse des admissions «à cause de» n’est pas si forte que cela. «On est passé de 50 % à 40 % des hospitalisations qui sont «pour la COVID», ditil. C’est une différence, oui, mais ça n’est pas énorme et ça semble s’être stabilisé à 40 % depuis le début de juin. On a aussi encore beaucoup d’hospitalisations. Que ce soit «avec» ou «à cause de», on en a toujours environ 1500 en cours. […] Et ça peut aussi refléter l’ensemble des pratiques hospitalières, comme le fait de tester les patients avant leur chirurgie. Dans tous les cas, ça amène plus de travail en termes de mesures de protection, isolement, etc., que si quelqu’un est là pour une chirurgie sans avoir la COVID.»

Bref, d’un point de vue épidémiologique, le recul (relatif) des hospitalisations «à cause de» la COVID est peut-être une bonne nouvelle, mais du point de vue de la charge sur le système de santé, ça n’allège pas le fardeau tant que ça — même si ça le fait un peu.

«Un patient qui est là «à cause de» la COVID, c’est sûr qu’il va être soigné par un pneumologue ou un interniste, renchérit Dr Carignan. Mais quelqu’un qui est là pour une chirurgie et qui teste positif, si c’est peu sévère il va généralement rester aux soins de son médecin traitant, alors ça ne changera pas tant que ça son hospitalisation. Il y a quand même une mortalité accrue qui est associée à ça, ça peut retarder son congé et il va falloir l’isoler, mais dans l’ensemble ça ne change pas tant que ça son hospitalisation. Mais c’est sûr que ça compliquer les trajectoires de soins, ça complique les tests et certains protocoles. La gestion des lits n’est pas la même non plus.»

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2022-10-01T07:00:00.0000000Z

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