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LES LUTTES À SUIVRE DANS L’EST BONAVENTURE : L’EX-CHÂTEAU FORT LIBÉRAL A BIEN CHANGÉ

GILLES GAGNÉ Collaboration spéciale

NEW RICHMOND — Jadis reconnue comme un château fort libéral, la circonscription de Bonaventure constitue le théâtre d’une vigoureuse course à quatre candidats depuis le début de septembre. Le Parti libéral a été représenté avec succès par Gérard-D. Levesque pendant 37 ans à compter de 1956 et par Nathalie Normandeau, pendant 13 ans à compter de 1998.

Ce règne des «rouges», qui a duré presque 52 ans sur une possibilité de 56, a été brisé une seconde fois en 2012 par Sylvain Roy, qui terminera dans quelques jours trois mandats totalisant 10 ans. Il met un terme à sa carrière politique 16 mois après avoir rompu les liens avec le Parti québécois.

Trois facteurs ont effrité ce règne libéral depuis le retrait de Nathalie

Normandeau de la vie politique en 2011. Le changement des limites de la circonscription pour inclure la ville de Chandler, où le Parti québécois a traditionnellement pu compter sur un fort appui, le manque de renouvellement de la base partisane et l’effet des politiques d’austérité du gouvernement de Philippe Couillard entre 2014 et 2018.

C’est souvent la présence de la minorité anglophone, représentant environ 11 % des électeurs de Bonaventure, qui a favorisé le Parti libéral.

Ex-journaliste et citoyenne engagée dans la communauté anglophone, Cynthia Dow craint une démobilisation de ses concitoyens, qui lui parlent peu de la campagne électorale.

«Il y a une chose de sûre, les anglophones sont inquiets au sujet de la loi 96, qui vient réduire l’utilisation de l’anglais. Ils se sont sentis trahis par les efforts du Parti libéral visant à rendre le bill 96 acceptable, alors qu’ils le considèrent irrecevable. Je trouverais dommage que les anglophones ne votent pas, mais pour une tout autre raison. Je trouve dangereux de ne pas se prononcer sur l’enjeu climatique. C’est notre dernière occasion d’envoyer un message fort en ce sens. La langue que nous parlons n’aura aucune importance si nous ne pouvons respirer», dit Mme Dow.

PLACES EN GARDERIE, LOGEMENT ET MAIN-D’OEUVRE

Des projets industriels ou de services axés sur la création d’emplois ont longtemps ponctué les campagnes électorales en Gaspésie, mais pas en 2022. Cette année, ce sont les besoins de base qui dominent en campagne, les pénuries de places en garderies, de logement, de maind’oeuvre et de transport interrégional, des priorités interreliées.

Force est de constater que ces pénuries se sont accentuées depuis le début du mandat de la Coalition avenir Québec, en octobre 2018.

La négation de la pénurie de places en garderie, et même la déconnexion du ministère de la Famille du contexte gaspésien, ont été soulignées depuis un an par les sociologues Pierre-Luc Lupien et Nicolas Roy, qui vivent dans Bonaventure. Ils font notamment valoir que les prévisions du ministère sont établies en fonction d’un déclin démographique, alors que la population de la Gaspésie augmente, surtout dans la tranche en âge de procréer.

Ils disent à ce sujet que le «modèle du MFQ [ministère de la Famille du Québec], orienté par des principes économiques mur à mur et rudimentaires, n’est pas seulement problématique du point de vue méthodologique, il est l’expression d’une vision politique étroite en matière de développement régional. Alors que la [région] connaît un regain de vitalité depuis quelques années, ce type d’estimations à l’emporte-pièce pourrait agir à la manière d’une «prophétie autoréalisatrice». En faisant du déclin «la prévision d’un futur attendu, le MFQ risque d’en faire une réalité en limitant la création de places dans la région, contraignant ainsi des familles à la quitter.»

Jusqu’au 19 avril, le premier ministre François Legault niait l’existence d’une crise du logement au Québec, notamment dans les régions rurales. Sa ministre des Affaires municipales et de l’habitation refusait d’utiliser le mot pénurie en août 2021 à Gaspé, parlant d’une «rareté de logement.»

En transport, malgré la promesse d’une réfection de la voie ferrée jusqu’à Gaspé, sans échéancier cependant, l’enveloppe de 235 millions (M) $ accordée par les gouvernements libéral et caquiste depuis 2017 a été investie tellement lentement qu’après cinq ans et 100 M$, pas un seul kilomètre de rail supplémentaire n’a été mis à la disposition du transporteur régional, la Société du chemin de fer de la Gaspésie. Entre juin 2020 et février 2022, aucun appel n’a été publié par Transports Québec, propriétaire de l’emprise, pour réparer les ponts, l’enjeu principal. Le réseau devait être fonctionnel cette année jusqu’à PortDaniel. Ce sera maintenant en 2024.

DES ÉLECTEURS FIDÈLES

Les électeurs de Bonaventure sont assez fidèles aux gens qu’ils élisent. À part Gérard-D. Lévesque et Nathalie Normandeau, seulement trois autres députés ont représenté Bonaventure depuis 1956, Sylvain Roy, avec une décennie, dont presque neuf pour le Parti québécois, Marcel Landry, de 1994 à 1998, gagnants de deux élections la même année sous la bannière péquiste, et le libéral Damien Arsenault, qui a été en poste durant neuf mois, de 2011 à 2012.

Le «bord du pouvoir» est loin d’être obsessif dans le sud de la Gaspésie. En 66 ans depuis 1956, le vote est allé vers le parti gagnant pour des mandats totalisant 35 ans, comparativement à 31 ans pour des partis de l’opposition.

Les électeurs de Bonaventure verront sept noms sur leur bulletin de vote, dont les quatre candidats au coeur de la course, Alexis Deschênes (Parti québécois), Catherine Cyr Wright (Québec solidaire), Catherine Blouin (Coalition avenir Québec) et Christian Cyr (Parti libéral du Québec. Jocelyn Rioux porte les couleurs de Climat Québec tandis que l’Union fait la force est représentée par Anne Marie Lauzon de Chandler. François Therrien est le candidat du Parti conservateur, mais il a été très discret.

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