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EUX ET NOUS

Samir Ghrib Entraîneur soccer masculin Rouge et Or Université Laval

Samir Ghrib est entraîneur de la formation masculine de soccer du Rouge et Or de l’Université Laval depuis 2000. Il profite des élections pour partager leurs réflexions à l’occasion de la série Regards sur la campagne, un projet des Coops de l’information visant à donner la parole à des gens de tous les horizons sur le Québec d’aujourd’hui.

Ça fait 38 hivers que je suis chez vous qui est devenu chez moi, une expression que j’utilise souvent avec affection, admiration et fierté.

Affection, car je suis littéralement tombé amoureux de ma société d’accueil, en amour comme on dit au Québec. Une société où il n’y pas de tensions inutiles dans les rapports humains, une société où on te fait sentir que tu fais partie du «nous» sans te faire sentir que tu viens d’ailleurs. Pour moi, c’est ça la valeur québécoise numéro 1.

Admiration, car même après 38 hivers, je suis toujours émerveillé par la douceur de vivre de la société québécoise, son pragmatisme et la gentillesse de ses citoyens.

On me fera remarquer que je peux être biaisé dans mes perceptions, car je vis à Québec, une société plus homogène, et le fait que je provienne d’un milieu sportif, généralement ouvert et rassembleur autour d’une passion, qui fait fi des différences, pour les transformer en forces. Je ne doute pas que d’autres membres dites de communautés culturelles, minorités visibles, allophones, autant d’étiquettes que je déteste, peuvent connaître des parcours plus difficiles. Mais c’est mon histoire, mon expérience québécoise à moi. Elle est positive grâce aux gens que je côtoie quotidiennement, et ce à travers le Québec au complet.

Fierté, car aimer le Québec, c’est aimer ses gens, comprendre ses combats, connaître son histoire et surtout contribuer à son épanouissement. Moi, je le fais avec un ballon rond.

Lors d’un rassemblement après le tragique événement de la mosquée de Québec, une dame avait une pancarte où il était écrit : «vous êtes chez vous». Je suis allé vers elle, je l’ai serrée dans mes bras et je lui ai dit : «je sais». Tout est là. Je n’ai jamais été aussi fier que de faire partie de la société québécoise.

Donc, ma relation avec le Québec est une belle aventure d’affection mutuelle, d’admiration et de fierté, mais également teintée aujourd’hui d’une légère inquiétude face aux déclarations maladroites des politiciens en cette période d’élections.

Inquiet pour mes enfants, nés ici, ceux que j’appelle mes «petits Québécois d’amour», car un débat sur l’immigration mal ficelé sera toujours un risque de voir certains les pousser vers le «eux», avec comme toile de fond la peur de l’autre. Ce débat peut être fait avec intelligence et bienveillance.

La peur de l’autre ne concerne pas juste les nouveaux ou futurs arrivants, mais aussi, avec un effet boomerang, ceux qui sont là depuis plusieurs décennies. À chaque débat sur l’immigration fait sans nuances, j’ai toujours cette crainte que le regard de certains de mes concitoyens ne se radicalise.

Monsieur Legault, je tiens à vous rassurer, nous sommes des milliers à aimer le Québec tel qu’il est, à «continuer» à contribuer à son épanouissement. Si j’étais votre rédacteur de discours, je me permettrais de faire un petit ajout quand vous évoquez les valeurs québécoises : juste dire que ce sont aussi des valeurs universelles, une façon de faire fondre le «eux» dans le «nous», dans une marmite de potion magique, comme dans le village gaulois qui se dispute, qui avance et qui s’épanouit sous nos yeux.

La société québécoise est forte, elle le prouve depuis si longtemps. Nous l’aimons, je l’aime.

Ma relation avec le Québec est une belle aventure d’affection mutuelle, d’admiration et de fierté, mais teintée aujourd’hui d’une légère inquiétude

PLACE PUBLIQUE

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2022-10-01T07:00:00.0000000Z

2022-10-01T07:00:00.0000000Z

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