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FANTAISIES ANIMALIÈRES

JOSIANNE DESLOGES jdesloges@lesoleil.com Collaboration spéciale

«Il s’agit d’un monde où les lapins prennent le thé avec les petites filles et où les oursons voyagent entre les planètes», écrit Pascale Beaudet à propos de l’univers de Michel Saulnier. Le bestiaire du sculpteur de Saint-Jean-Port-Joli est à l’honneur au Centre Materia dans l’exposition Lièvres, ours etcorneilles, une échappée fantaisiste taillée pour le printemps.

Depuis plus de 40 ans, Michel Saulnier utilise les figures animalières pour aborder l’état du monde et y semer l’insolite et l’émerveillement. On peut tisser de beaux liens entre son corpus et ceux de Pierre&Marie et de l’exposition De l’autre côté du miroir, présentés à Québec en ce moment.

ENTRE L’ATELIER ET L’ESPACE PUBLIC

Celui qui a créé de nombreuses oeuvres pour les écoles, les hôpitaux et les centres pour personnes âgées cultive une vision profondément humaniste. Son souci de ses semblables, de leurs écueils et de leur besoin de réconfort guide sa pratique, remplie d’allers-retours entre l’atelier et l’espace public.

Au Centre Materia, Ours vert sur une planète est bariolée de souhaits pour la Terre et se tient sur un ballon de bois brûlé. Il fait partie d’une série de variations qui associent sphère et ursidés et dont l’incarnation la plus monumentale est Je suis là (2014) à l’Hôpital pour enfants de Montréal du CUSM. L’équilibriste bienveillant, debout sur une planète, salue les jeunes patients depuis l’extérieur.

Alors que Vol libre et La pomme et le colibri (2022), conçues pour le CISSS de Chaudière-Appalaches de Lévis, sont de flamboyants dérivés d’un travail de gravure sur plaques d’aluminium qui a donné la série d’impressions Corvidae.

L’artiste s’applique, tant sur les feuilles que sur les murs, à déployer des apparitions ailées, qui rappellent les oiseaux de ciel des tableaux de Magritte. Au fil du temps, il a aussi multiplié les clins d’oeil à Molinari, en découpant des silhouettes d’animaux des tableaux de lignes colorées.

Plusieurs sculptures présentées au Centre Materia sont dérivées de projets extérieurs qui n’ont jamais vu le jour. Des ébauches, faites pour comprendre les volumes, ont été retravaillées et polies par l’artiste spécialement pour l’exposition. De nouvelles variantes en papier, en bois ou en métal montrent bien comment l’oeuvre de Saulnier se déploie en constellations.

DES FABLES EN TROIS DIMENSIONS

Le sculpteur assemble les personnages et les symboles récurrents comme le ferait un auteur de contes et de fables.

Sa famille de Lapins-culbuto ressemble à une collection de jouets géants. Des troncs font office de corps, les marques laissées par la gouge évoquent à la fois l’écorce et la fourrure et leurs oreilles se déploient comme des paysages. Saulnier a utilisé des branches et des éléments de maquette (arbres, mousse) pour que leurs têtes se transforment en territoires.

L’artiste a participé à plusieurs événements d’envergure au Japon dans les années 80 et 90, période où il a commencé à intégrer des lapins, l’animal de l’enfance dans l’imaginaire local. Pour son Nez-ours, il s’est inspiré des Daruma, ces figurines creuses sans bras ni jambes auxquelles il faut peindre un oeil, faire un souhait, et si celui-ci se réalise, peindre le second.

Les bêtes aux longues oreilles se retrouvent aussi dans sa série d’estampes Liber Abaci, où elles se multiplient en suivant la suite mathématique de Fibonacci. La formule établie en 1202 pour évaluer la croissance d’une population de lapins sert à calculer le nombre d’or, clé de l’harmonie dans les compositions artistiques.

LA CHAPELLE

DES PROCESSIONS

Longtemps très impliqué au centre d’artistes Est-Nord-Est et à la Biennale de sculpture de SaintJean-Port-Joli, Michel Saulnier s’est concentré ces derniers mois sur un nouveau projet.

Il a acheté et restauré la Chapelle des processions, voisine de sa maison (toutes deux conçues par l’architecte Charles Bernier), pour en faire un lieu d’exposition. Il souhaite en faire un lieu de rassemblement pour les acteurs artistiques du coin, de la Fête des chants de marins à Fleuve Espace Danse.

La programmation de la prochaine saison estivale est déjà établie, avec une dizaine d’artistes. Elle s’ouvrira par la mise en valeur du travail d’André-Médard Bourgault pour souligner le 100e anniversaire de la sculpture sur bois à Saint-Jean-Port-Joli.

L’exposition Lièvres, ours et corneilles se poursuit jusqu’au 14 mai au

395, boul. Charest Est, Québec.

Info : centremateria.com

ARTS

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