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AUTRE ÉTÉ DIFFICILE EN VUE

ÉMILIE PELLETIER epelletier@lesoleil.com

À un mois du début des vacances, l’étau se resserre sur les camps adaptés. Après les publicités, le recrutement intensif et les salaires bonifiés, ne reste plus qu’à prier pour que des moniteurs rejoignent les rangs. Question d’éviter à des familles de se retrouver le bec à l’eau.

Autisme Québec lancera sa saison de camps dans un mois jour pour jour. Pendant sept semaines, les parents pourront venir y reconduire leurs jeunes. Sauf ceux qui n’auront pas cette chance, faute d’accompagnateurs en quantité suffisante.

«La rareté de main-d’oeuvre provoque beaucoup de complexité dans la planification des services encore cette année», confirme à regret la directrice générale de l’association régionale, Véronique Tremblay.

Ce qu’elle redoutait se confirme. Pas moins de 78 familles sur les 173 inscrites ne seront pas en mesure d’obtenir la place convoitée.

Chiffre qui, selon la directrice générale, illustre l’ampleur du «défi» et «démontre la précarité des services de camp de jour spécialisé».

«Outre le financement précaire des organismes dédiés, la rareté de main-d’oeuvre fragilise grandement la planification de nos services estivaux», ajoute Mme Tremblay.

Autisme Québec avait pourtant multiplié les efforts «créatifs» : affichage et recrutement dans les cégeps et universités, révision des ratios d’accompagnement pour maximiser ses ressources, majoration de l’échelle salariale de plus de 2 $, pour atteindre 18,50 $ l’heure dès le premier échelon.

Mais force est de constater que le nombre de candidatures reçues n’a pas crû. «Ça entre au comptegouttes», lâche-t-elle.

«Depuis 2019, on voit vraiment bien l’impact de la pénurie. On a plus de demandes et moins d’employés : ce débalancement, ce sont les parents qui en paient les frais.»

Inquiète pour ces familles qui se «tricotent un été», Véronique Tremblay en appelle a un ralliement des organisations et des autorités de la santé «pour assurer des services essentiels pour les familles».

SANS NOUVELLES DES CANDIDATS

Chez Cité Joie, à Lac-Beauport, la situation actuelle n’est guère plus évidente.

En poste depuis un mois, le nouveau directeur général ne s’en cache pas : le casse-tête actuel l’empêche de dormir.

«Ce qui cause mon insomnie, c’est qu’on a de la misère à embaucher, laisse tomber Jessy Morissette. C’était mon premier enjeu quand je suis arrivé et ce l’est toujours. On peine à combler les besoins de base.»

Centre de répit et de vacances pour les personnes vivant avec une déficience physique, intellectuelle ou présentant un trouble du spectre de l’autisme, Cité Joie accueille chaque année plus de 2600 personnes handicapées, adultes et enfants, pour des séjours.

Le camp de vacances doit débuter le 19 juin. «Et les besoins sont loin d’être comblés. L’heure est critique, le 19 juin, c’est demain matin», alerte M. Morissette. Cité Joie plafonnera en 2023 à «pleine capacité», à 50 jeunes et adultes par semaine.

«On a eu plusieurs CV, mais après l’entrevue, quand on les rappelle, les candidats ne nous donnent plus de nouvelles», déplore M. Morissette.

«Soit ils magasinent et vont au plus offrant ou ce qui va les combler le mieux. Un peu comme les no-show au restaurant», témoigne-t-il.

Résultat : seuls trois accompagnateurs ont été embauchés. «Ça m’en prend minimum neuf», calcule le directeur général. Il prévoit lui-même combler des heures sur le terrain comme moniteur pendant l’été.

Le tout, afin d’éviter à tout prix de refuser des participants. «On ne peut pas mettre la clé sous la porte. On veut que ça fonctionne, alors on va mettre les bouchées doubles», promet Jessy Morissette.

«AMÉLIORATION», MAIS PAS LA PERFECTION

Parmi les services de camps adaptés contactés par Le Soleil, seul celui du Patro Roc Amadour parle d’une «amélioration» de la situation pour la clientèle à besoins particuliers.

«Ça pourrait aller encore mieux, mais ce n’est pas désastreux», commente Valérie Racette, directrice des services adaptés.

Pour ses clientèles adolescentes et adultes, le centre communautaire situé à Limoilou est jusqu’ici parvenu à trouver neuf accompagnateurs sur les dix recherchés. Une cible «atteignable» fixée en début de saison, qui lui permettra de divertir une cinquantaine d’usagers par semaine.

Sans commune mesure avec les années antérieures, alors qu’«on accueillait 120 adultes et 70 ados. On est loin de là», illustre Mme Racette.

«DÉFI» GÉNÉRALISÉ

L’Association des camps du Québec et ses 450 membres constatent en effet que, de manière générale, le recrutement n’est «pas plus facile que par le passé».

«Mais ce n’est pas impossible», remarque Valérie Desrosiers, coordinatrice aux communications.

Parmi 418 membres et autres représentants de camps, au-delà de 75 % du personnel d’animation était déjà embauché à la fin avril, chiffre l’Association dans un sondage.

Les candidatures ne pleuvent pas. Quelque 235 offres d’emplois en camps partout au Québec figurent toujours sur le site Web de l’Association.

La problématique des camps adaptés se ressent également à l’échelle provinciale. «C’est toujours plus ardu. Cette année ne fait pas exception», remarque la porte-parole.

La pandémie a contribué à rendre difficile le recrutement, pointe du doigt l’Association des camps du Québec. Les deux étés de fermeture forcée ont mené plusieurs moniteurs à se réorienter. En plus du creux démographique, le bassin ne s’est donc pas renouvelé comme à l’habitude.

Dans l’attente d’être certains d’avoir formé toute leur équipe d’animateurs, certains camps ont limité le nombre de places offertes à l’inscription, préférant ouvrir des places supplémentaires si possible.

À la Ville de Québec, la situation est moins critique que l’an dernier. Les organismes partenaires ont déniché 90 % de leurs moniteurs.

Constat «vraiment positif», se félicite Marie-Pierre Boucher, conseillère municipale responsable des loisirs et des sports au comité exécutif, d’avis que le rehaussement des salaires aura été bénéfique. L’élue se veut par ailleurs rassurante, soutenant que des places sont encore disponibles dans la majorité des sites.

La Ville promet par ailleurs son «aide» aux camps spécialisés qui en font la demande.

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