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Petits insectes, grand potentiel

Bien que l’alimentation à base d’insectes soit porteuse d’avenir, il est minuit moins une pour les éleveurs québécois, qui voient de gros joueurs accaparer les parts de ce marché mondial.

ANNIE LAFRANCE alafrance@lesoleil.com

L’élevage d’insectes comestibles, c’est pour le futur? Non! C’est pour maintenant.

Bien que l’alimentation à base d’insectes soit porteuse d’avenir, il est minuit moins une pour les éleveurs d’insectes québécois, qui voient de gros joueurs accaparer les parts de ce marché mondial.

«On voit la fenêtre d’investissement se refermer graduellement. Si on veut réussir à se tailler une place dans une industrie déjà très convoitée, c’est maintenant qu’il faut accélérer le rythme», affirme Marc-André Hébert, président d’Entologik.

C’est pourquoi l’entrepreneur tente actuellement de trouver les bons investisseurs pour l’aider à bâtir un plancher de production entièrement automatisé.

Son entreprise installée à AngeGardien, en Montérégie, produit annuellement trois tonnes de poudre de grillons biologiques, un super aliment qui peut s’intégrer dans plusieurs recettes. Il compte doubler sa production cette année. Actuellement, les grillons et les ténébrions meuniers sont les deux seuls insectes approuvés par Santé Canada pour la consommation humaine.

«Mais pour être compétitif, il faudrait que j’en produise beaucoup plus. Et, pour ça, j’ai besoin de nouveaux équipements», explique celui qui préside l’Association des producteurs et transformateurs d’insectes du Québec (AÉTIQ).

UNE USINE MODÈLE

À Drummondville, Entosystem semble avoir pris une longueur d’avance et être en bonne position pour fournir des insectes transformés à des fabricants de moulées animales.

Inaugurée cette semaine, sa nouvelle usine de production en économie circulaire devrait démarrer ses activités d’ici un mois.

«La demande est là et elle est déjà très forte. Mais il faut être capable de fournir de très grandes quantités si on veut lui répondre adéquatement», soutient le président Cédric Provost.

Pour bâtir son usine de haute technologie, Entosystem a reçu plus de 60 millions $ d’investissements publics et privés. Ses nouvelles installations lui permettront d’avoir la plus grande capacité de production en Amérique du Nord, soutient le président, qui a déjà des contrats en poche avec des géants en alimentation animale.

Entosystem recevra quotidiennement 250 tonnes de résidus alimentaires et de déchets organiques pour nourrir ses larves de mouche soldat noire. Les insectes seront ensuite séchés et broyés en une riche farine protéinée destinée à l’alimentation des animaux domestiques et d’élevage.

Bien que les insectes d’Entosystem soient uniquement destinés à la consommation animale, son modèle d’affaires pourrait inspirer d’autres producteurs dédiés à l’alimentation humaine.

ASSURER LA CROISSANCE

Pour assurer la croissance et la pérennité de cette jeune industrie, une trentaine d’acteurs se sont associés en 2021 pour créer la Table filière des insectes comestibles (TFIC). Celle-ci rassemble à la fois des producteurs, des transformateurs, des distributeurs, des organismes gouvernementaux et même des gens de l’hôtellerie.

Les producteurs et transformateurs ont besoin de capitaux pour financer leurs opérations. Ils veulent se faire entendre des gouvernements. La Table filière déposera son plan d’action stratégique en juin.

UN MARCHÉ MONDIAL

Marc-André Hébert ne le cache pas : son souhait est de rattraper le retard de production. Le Québec serait environ 10 à 15 ans en retard par rapport à l’Europe. Il fait référence à la compagnie française Ÿnsect, qui a en poche pour

175 millions d’euros (256 millions $) de vente sous contrat et plus de 1 milliard $ de vente dans le collimateur.

Originalement orientée vers l’alimentation du bétail, Ÿnsect se tourne maintenant vers l’alimentation des animaux de compagnie et l’alimentation humaine. Elle vient également d’acheter le plus important producteur de ténébrions aux États-Unis et est en négociation avec un géant du Mexique, en plus d’envisager une implantation en Asie. Avec une production annuelle de 160 000 tonnes d’insectes par an, Ÿnsect est la plus grosse ferme d’insectes au monde.

«Le potentiel est énorme. Une entreprise comme Entologik ne sera probablement jamais capable de rattraper l’avance qu’a Ÿnsect, mais on espère bien être en mesure de lui faire une petite compétition dans les prochaines années avec nos grillons biologiques», lance M. Hébert, dont la ferme est la seule certifiée biologique au Québec.

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2023-05-27T07:00:00.0000000Z

2023-05-27T07:00:00.0000000Z

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