LeSoleilSurMonOrdi.ca

L’Alzheimeurt

Lynda Beaulieu Présidente du Diamant Ce texte est un hommage à Marie Bédard, une maman incroyable qui prend soin de sa petite de 55 ans depuis maintenant plus de cinq ans.

Oui, vous avez bien lu, il n’y a pas de faute dans mon titre. Dès que le verdict de cette maladie dégénérative tombe, le deuil de l’être aimé s’enclenche à la même vitesse que les cellules et les neurones s’atrophient et se détériorent.

Quand les premiers signes apparaissent, que les vêtements se portent à l’envers, que les ustensiles de table ont moins d’utilité que les mains, que les souliers sont inversés, le processus est entamé et tant qu’on ne trouvera pas le remède miracle, rien ne pourra l’arrêter.

Qui, quoi, comment et oublions le pourquoi qui ne servira à rien dans l’équation. Qui s’occupera de nous quand nous perdrons nos repères? Que faire? Comment se procurer de l’aide? Les plus chanceux d’entre nous seront entourés de proches aidants débrouillards prêts à tout pour s’assurer de nous procurer des services nécessaires et adéquats. Mais quel sort sera réservé aux autres, les laissés pour compte, les sans famille?

Nous vivons de plus en plus vieux et quand on a une belle qualité de vie, c’est tant mieux. Mais n’estce pas là l’une des raisons pour lesquelles il y a beaucoup plus de personnes qui ont la maladie d’Alzheimer? Le prolongement? Que dire des atteintes précoces, quand un parent accompagne son enfant en sens inverse. Les soins sont beaucoup plus importants et difficiles que lorsqu’ils étaient poupons.

Un corps d’adulte, c’est lourd, ça vient avec un entretien particulier, homme ou femme, les couches sont plus lourdes et que dire des dégâts collatéraux parce que plus souvent qu’autrement, comme les petits enfants, ils finissent par jouer dedans! Il n’y aura jamais assez de répit pour ceux qui y consacrent temps et énergie pour une bonne partie de leur vie.

Grand-maman Léna en était atteinte. Ma mère, sa bru, est celle qui en a pris soin durant plusieurs années au grand bonheur de mon père qui, lui, travaillait sept jours sur sept.

Nous étions quatre enfants âgés entre 5 et 12 ans à la maison, nous l’avons regardé dépérir, jusqu’au jour où il a malheureusement fallu la placer dans un sanatorium pour sa sécurité, parce qu’elle faisait de l’errance la nuit et qu’elle échappait à notre vigilance.

Il était déconcertant de la voir tenter de remplir sa tasse de café dans les toilettes en tirant sur la chasse d’eau, sucrer son café avec du Old Dutch, crier «arrêtez-les ces maudits fous-là, vous voyez bien qu’ils vont entrer dans la maison!» en regardant la lutte à la télé.

Lorsqu’elle décidait d’aller voir sa mère décédée 30 ans auparavant, maman nous demandait à mon frère âgé de six ans et moi qui n’en avait que cinq, de l’emmener faire le tour du bloc et de la ramener chez nous. Une fois revenue à l’appartement, quand ma mère ouvrait la porte, grandmaman Léna croyant être enfin arrivée chez sa mère, lui disait sur un ton sévère «mais qu’est-ce que tu fais icitte, toi?» et ma mère de lui répondre : «Je suis venue voir votre mère, mais malheureusement elle est partie faire des commissions.» Ça demande beaucoup de patience de s’occuper d’eux, c’est qu’en plus de tous les soins prodigués, ils se répètent sans cesse. Oui, j’admets que ça peut être énervant par moment, mais il faut se rappeler que pour eux, c’est la première fois qu’ils posent une question ou émettent un commentaire.

Alors, il faut faire l’effort de leur répondre gentiment. Il faut les traiter avec respect et douceur et se rappeler puisque nous, nous en avons encore la faculté, que même si leur mémoire s’est transformée en un fromage gruyère au fil des ans, le coeur battant à l’intérieur de cet étui corporel déserté par l’âme et l’esprit, eh bien, il vous a aimé!

Un corps d’adulte, c’est lourd, ça vient avec un entretien particulier, homme ou femme

PLACE PUBLIQUE

fr-ca

2023-05-27T07:00:00.0000000Z

2023-05-27T07:00:00.0000000Z

https://lesoleil.pressreader.com/article/281809993271639

Groupe Capitales Media